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Témoignage de Valérie Bégin

Photo de Valérie Bégin

Célébrer la vie

En septembre 2008, Valérie Bégin recevait un diagnostic auquel rien ne la prédisposait : un cancer du sein relativement agressif. Le choc a été brutal. Le rétablissement, long. Trop long, pour une jeune mère dans la trentaine qui carbure aux projets et aux défis. Treize ans plus tard, presque jour pour jour, alors qu’elle entame un nouveau chapitre de sa vie, elle se souvient.

« Tu as 33 ans, tu as une petite fille de trois ans, tu es dans ton développement de carrière, tu as de l’énergie, des projets, tu es dans ton élan et paf! Tu tombes en pleine face. » Une chute douloureuse dont Valérie a mis des années à se relever complètement. Si les traitements de chimiothérapie qu’elle a dû subir limitaient considérablement ses risques de récidive, ils ont aussi eu pour effet de l’affaiblir au point où elle a parfois eu l’impression que seules ses fonctions vitales continuaient de fonctionner.

Respecter ses limites

« J’ai été en arrêt de travail pendant onze mois. C’est ce que j’ai trouvé le plus pénible, dit-elle. Mon corps me lâchait, il n’était pas capable de suivre. Comme s’il me trahissait. » Une trahison difficile à accepter, particulièrement lorsqu’elle aurait voulu passer du temps avec sa fille et son conjoint. Ou lorsqu’elle avait l’impression d’abandonner son employeur et ses collègues. Son sentiment? « Une tristesse. Une tristesse de ne pas pouvoir être là où on voudrait être, de ne pas être adéquate, en quelque sorte. »

Il lui aura fallu cinq bonnes années avant de récupérer un niveau d’énergie normal. Cinq années où elle a dû s’armer de patience et faire preuve de beaucoup de résilience. Une période qui lui a demandé de s’écouter, de nommer ses limites, de les respecter. Le retour au travail a été pénible, même s’il s’est fait très progressivement et même si l’employeur de Valérie a été des plus conciliants. « Il fallait que je compose avec des limites importantes. C’était frustrant. Il m’est arrivé d’accepter une invitation, un projet, un dossier pour le regretter ensuite parce que la pente était plus difficile à remonter. J’ai dû travailler sur moi-même pour être capable d’établir mes limites sans me sentir coupable et de demander à mon entourage de les respecter. C’est une leçon de vie. »

En discutant avec d’autres jeunes survivantes du cancer, elle a réalisé que, trop souvent, les collègues et l’employeur pensent que tout est fini lorsque la personne retourne au travail. « Attention à la pression. La personne a encore des traumatismes, des sensibilités, et sa capacité physique n’est plus la même. De toute façon, elle ne reviendra pas comme elle était avant la maladie. Elle n’a plus les mêmes priorités. Le cancer marque une rupture dans la vie. »

Une famille tricotée serré

Valérie a puisé sa force dans la solidarité dont son entourage a fait preuve. Son conjoint de l’époque, qui a été d’un soutien indéfectible et qui a tenu le fort pendant cette période. Les membres de sa famille, qui ont resserré les rangs autour d’elle. Ils ont été présents chaque fois que nécessaire, que ce soit pour l’accompagner à ses traitements, pour garder sa fille, pour encourager, réconforter, épauler.»

« Les événements ont fait en sorte que nos liens familiaux se sont renforcés, parce que tous se sont mobilisés. Dans un sens, le hasard a bien fait les choses puisque ma maladie a coïncidé avec le congé de maternité de ma grande sœur et le début de la retraite de ma mère. Nous avons passé beaucoup de temps ensemble. Je ne peux pas concevoir comment j’aurais pu aussi bien traverser cette période si je n’avais pas été autant entourée », admet-elle.

Pour la suite des choses

C’est peut-être parce qu’elle s’est sentie épaulée que Valérie a rapidement éprouvé le besoin de donner au suivant et de s’impliquer pour la cause. Elle s’est donc engagée comme porteur de lumière. « J’étais plus jeune que la moyenne des femmes traitées au Centre des maladies du sein. Nous étions seulement cinq à l’époque. Il y a une recrudescence depuis, et les femmes atteintes sont de plus en plus jeunes. Ça me préoccupe beaucoup. Il faut que la recherche en matière de prévention ou de détection précoce continue. »

Que reste-t-il après toutes ces années? Une grande sérénité. « Je m’écoute beaucoup plus. Je suis plus mollo dans mon rythme en général. Moins à la course tout le temps. Je vois à quel point je courais avant d’avoir mon diagnostic. Mes horaires étaient super chargés et le stress, au plafond. J’ai vraiment diminué ma cadence. Je suis mieux, je suis plus heureuse. Je ressens le besoin de profiter de la vie. Je veux profiter de mon présent et de mon futur à court et moyen termes. Je ne veux pas reporter à trop longtemps mes projets. Je veux juste avoir le temps de réaliser certains rêves et faire ce dont j’ai envie! »

Témoignage de Diane Breton

Diane Breton se souvient très bien de ce qu’elle faisait et d’où elle se trouvait quand Valérie lui a annoncé qu’elle était atteinte d’un cancer. C’était en septembre 2008. Elle séjournait à Mont-Tremblant avec des membres de sa famille. Le séjour a bien évidemment pris une autre couleur. Momentanément. Parce qu’une fois le choc passé, c’est toute la famille qui a fait face aux côtés de Valérie.

La difficile acceptation

« C’est un événement tellement gros, surprenant, important, qu’on s’en souvient pour toujours, affirme-t-elle. Sur le coup, on pleure et on a peur. On ressent un mélange de colère, d’étonnement et de crainte. Mais ensuite, on essaie d’adopter des attitudes qui vont aider. On se retrousse les manches et on avance. »

Avancer, oui. Il le faut. N’empêche. Aucun parent ne veut voir son enfant souffrir. Madame Breton se souvient d’avoir accompagné Valérie à son premier traitement de chimiothérapie. Elle voyait sa fille dans une salle, avec d’autres femmes, chacune assise sur un fauteuil confortable. Le personnel installait les seringues et tout l’équipement. « J’ai pensé “Ce n’est pas normal. Ce n’est pas ma mère de 80 ans qui est là. Ce n’est pas moi. C’est ma fille de 33 ans.” Il y avait quelque chose de surréaliste dans tout ça. Mais le professionnalisme et les qualités humaines de l’équipe médicale du Centre des maladies du sein étaient de nature à nous rassurer. Sans le soutien exceptionnel et constant de cette équipe, il aurait été plus difficile de franchir les étapes et de croire à la guérison. »

La famille comme un rempart

« Dans un processus de guérison, le premier intervenant, c’est la personne qui est malade, rappelle madame Breton. C’est elle qui fait le grand bout. Et pour ce grand bout-là, je lève mon chapeau à Valérie. Et moi, comme mère, j’étais prête à tout faire pour aider ma fille. “Qu’est-ce que je peux faire? Je ne veux pas être de trop, je ne veux pas être insistante, mais je suis là. Je vais faire tout ce que je peux faire pour t’aider.” C’est comme ça qu’on se place. »

Et c’est la posture que toute la famille a adoptée. Qu’il s’agisse de garder la fille de Valérie, alors âgée de trois ans, d’accompagner à des rendez-vous ou encore d’être simplement à l’écoute, les proches de Valérie se sont serré les coudes et ont traversé la tempête avec elle, solidaires. L’entraide est inscrite dans l’ADN des Breton-Bégin-Lauzière. La maladie de Valérie aura été, une fois de plus, une occasion de le constater. « C’est elle qui a fait face, mais elle était accompagnée. C’était un accompagnement de famille », précise madame Breton.

Viva la vida

Tout au long de son combat contre la maladie, Valérie avait une chanson fétiche : Viva la vida, du groupe Coldplay. « C’est une chanson pleine d’espoir. Ce n’est pas une chanson triste. C’est une chanson qui allait avec son état d’esprit par rapport à ce que Valérie avait à vivre », se souvient-elle. Une chanson à son image.

Madame Breton souligne d’ailleurs que la façon de traverser la maladie varie selon la personnalité de chacun. « Bien sûr qu’il y avait des moments difficiles. Mais Valérie gardait une attitude optimiste et positive en général, dit-elle. Le fait qu’elle n’était pas elle-même effondrée nous a facilité la tâche et nous a permis d’être de meilleurs aidants. »